Nous avons indiqué récemment que l'association Les Arnaques s'est rebaptisée Net-Litiges. Cette dénomination plus neutre devrait lui éviter les procès pour parasitisme, qui ont grevé son budget, bien qu'elle les ait tous gagnés, comme le montre encore l'affaire suivante. La société Services Directs, qui exploite le site Homes-Click® l'a assignée en référé devant le président du tribunal de grande instance de Metz.
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La société Services Directs est censée mettre en relation des acheteurs et des vendeurs de biens immobiliers, inscrits sur son réseau Homes-Click ®, comme l'explique ce paragraphe de présentation :
L'inscription, moyennant finances, sur le site Homes-Click ®, est censée faciliter la vente d'un bien.
Sur le forum des Arnaques.com, néanmoins, certains propriétaires se sont interrogés sur l'intérêt de Homes-Click ®. Ils ont trouvé suspect que ce site fasse l'objet, sur le web, de "nombreux avis positifs". Voici l'essentiel de leur conversation, publiée en juillet 2015, puis retirée à la demande de Services Directs:
"Homes-Click, (...) je ne suis pas rassuré quand même, je dois leur faire confiance ou les fuir ???
- Trop d'avis positifs m'envoient un gros drapeau rouge et signal d'alarme.
- C'est vrai que c'est bizarre, 7 avis positifs, en 6 mois puis plus rien depuis novembre 2014 ! Aucun avis mitigé ou négatif (...) "
Sur le web, on trouve en effet des avis très laudateurs comme ceux-ci , dont on se demande s'ils ont vraiment été rédigés par des consommateurs :
ou celui-ci , qui dit notamment : "Merci à l'équipe d'Homes-Click (...) c'est ce qui a permis la vente. Sans comparaison possible avec les sites gratuits, on sait pourquoi on a payé"
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Les 19 et 20 août, une nouvelle conversation est apparue, sur le forum des Arnaques.com. Un premier internaute, surnommé "Sylefran", a indiqué avoir mis son appartement en vente sur Leboncoin, et avoir ensuite été contacté par Homes-Click ®,. (Il faut savoir que Homes-Click ®, utilise les numéros de téléphone déposés par les propriétaires pour les démarcher. Il leur assure avoir des acheteurs, mais leur demande de payer pour obtenir leurs coordonnées.)
Sykefran écrit:
"Ils demandent au vendeur le paiement de la somme de 798 euros, ce qui est inhabituel en la matière. Je pose des questions pour être rassuré sur la confiance que je peux leur accorder [car] je n'ai que des paroles et je n'entrevois pas la possibilité d'engagement écrit de leur part. Est-ce que cette société est connue de vous et si oui avez-vous des mises en garde ou des conseils à formuler?"
Un autre internaute lui donne les coordonnées de la société et l'invite à lire ses conditions générales de vente. "Sylefran" le remercie et s'interroge sur les nombreux commentaires positifs qu'il a découverts:
"J'ai, en plus, trouvé des commentaires de "prétendus?" utilisateurs de ce service et le côté unanimement très élogieux de TOUS les commentaires me paraît également suspect, devient-on trop parano en tels cas? J'aimerais trouver des commentaires non "suspectables" (sic) de complaisance."
Un troisième internaute intervient, et écrit notamment:
"On vous fait payer presque 800 euros (...) Pourquoi des acheteurs passeraient-ils par cet organisme pour accéder à des annonces en accès libre et gratuit sur Internet? (...) Une fois [que vous avez] payé, on vous annonce que les acheteurs vont prendre contact avec vous (qu'attendent-ils s'ils sont vraiment intéressés alors que l'annonce est sur Leboncoin ?) Vous les attendez encore (...) Vous ne recevez pas d'appel ? Ah oui mais les acheteurs ont déjà trouvé ailleurs..."
En septembre, après la publication de ces deux conversations, la société Services Directs a assigné l'association Les Arnaques, et demandé qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de ... 15 000 euros, pour dénigrement et parasitisme.
Elle a précisé que "le seul fait que la marque Homes-Click, soit associée à une dénomination très péjorative "LesArnaques" porte gravement atteinte à son image, et constitue en tant que tel un acte de dénigrement".
Le président du tribunal de grande instance, qui a statué le 10 novembre, lui répond en ces termes: "Force est pourtant de constater, à la lecture des messages susvisés, qu'il ne revêtent pas un caractère à l'évidence dénigrant"; ils traduisent les "sentiments d'internautes sur un site sur lequel ils s'interrogent." Considérer l'échange en cause comme dénigrant "reviendrait à priver la liberté d'expression des internautes et le droit d'information des consommateurs de toute signification."
Le président estime que "le parasitisme n'est pas plus établi". Le parasitisme est "un ensemble de comportements par lequel un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire", comme l'a rappelé la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 30 septembre 2009. Cet agissement qui consiste à “vivre aux crochets” d’un autre, n’implique pas nécessairement une situation de concurrence.
En l'occurrence, la société Services Directs "n'établit nullement que l'association Les Arnaques se serait placée dans son sillage afin de profiter de ses investissements sans bourse délier", écrit le président. "Outre le fait que l'association les Arnaques existe depuis dix ans, alors que le site Homes-Click n'existe que depuis 2010, les sujets objets de la présente procédure n'ont été vus que 265 fois, alors que le forum de l'association bénéficie d'une fréquentation largement supérieure, avec 375 000 messages, 6 000 sujets, 171 000 membres, et 10 sujets nouveaux par jour."
Le président ajoute : "La demanderesse ne peut pas sérieusement soutenir que la juxtaposition de la dénomination "lesArnaques.com" avec la marque "Homes-Click" serait constitutive en soi d'une atteinte à son image et constituerait un acte de dénigrement: si le nom "Arnaques" est certes provocateur, il est attribué à un forum d'échanges entre internautes avec pour objectif d'informer les consommateurs et de leur permettre un dialogue ou une médiation avec des professionnels, avec donc un but d'intérêt général (...) Prétendre le contraire empêcherait à l'avenir tout échange sur le fonctionnement d'une société dans tous les sites ayant pour objet la protection des consommateurs."
Enfin, "le référencement en troisième position, sur le moteur de recherche Google, du site LesArnaques.com, lors d'une recherche sur Homes-Click, ne peut être reproché à l'association, qui n'a aucun pouvoir sur les modes de référencement Google, seule la société développant ce moteur de recherche pouvant intervenir".
Le président du TGI déboute la société de sa demande, et la condamne à payer 1500 euros à l'association Les Arnaques. Une somme qui, si elle est versée, ne couvrira pas les frais d'avocat (2000 euros) et de transport - le procès, qui s'est tenu à Metz (Moselle), où se trouve le siège de la société, ayant été reporté une fois, à la dernière minute, à la demande de cette dernière.
[Mise à jour le 3 décembre :
le représentant légal de la société nous a contactés pour nous indiquer qu’un appel a été formé contre ce jugement.]
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